André Chédid, Par-delà les mots (1995)

André Chédid, Par-delà les mots
poèmes, éditions Flammarion, 1995

Le poème liminaire assigne clairement à la poésie quatre fonctions principales : « Elle questionne l’univers [...]. Elle nomme la liberté [...]. Elle assemble les fragments / Du visage dispersé // Et désigne le mystère / Qui demeure entier ». Qu’André Chedid écrive : Je, nous, voire il ou ils, c’est toujours l’Homme qui parle à travers son poème, de façon laconique, en convoquant à l’occasion divers symboles, tels le Feu, le Cyclone et le Silence, en sorte que le lecteur doit à son tour déchiffrer l’énigme. Au terme de l’interrogation, « Nos questions nous reviennent / Comme des balles». Cependant, le message se découvre aisément. La poésie d’Andrée Chedid, en effet, célèbre l’entre-deux, en appelle discrètement, sans lyrisme et en chantant d’une voix cassée, à un passage. Car l’aporie n’est jamais son fait, et pas davantage un certain manichéisme intellectuel. Elle n’oppose pas en effet les vérités atroces à des idéaux. La beauté offre simplement deux visages. D’un côté, « Nous pataugeons dans l’éphémère / Des feux de paille nous aveuglent / L’existence nous a égarés » et « D’autres fois / Sa parole se partage / Son regard accueille // Son souffle le mène / Jusqu’à l’audace d’aimer ». L’espoir, ainsi tissé, est beau à lire, exactement comme il fait beau vivre.

Pierre Perrin, revue La Bartavelle n° 2, juin 1995

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