Page 41 de L’autre versant du feu, paru en 1990, selon toute vraisemblance
réédité en juin 1991 dans le feu du prix Louise Labé,
l’auteur prévient peut-être :
« dans ce peu d’encre qui coule en moi
je respire plus large que le ciel ».
Page 80, est-ce une autre clé :
« je cesse de combattre ma folie
pour t’écrire à la lueur de mes blessures ».
Les poèmes, pour la plupart sans titre,
se présentent, malgré le choix du vers libre (avec un goût
marqué pour l’impair, à l’entour de neuf ou
onze syllabes, comme pour briser l’enchantement de l’octosyllabe)
tels des sortes de placards presque réguliers, chaque poème
avoisinant la douzaine de vers.
L’univers de François Montmaneix
semble être essentiellement celui de la rêverie amoureuse.
Revenant à l’enfance, ici et là, il confie :
« Je n’avais pas encore inventé le baiser
dont j’allais longuement mourir ».
Cette rêverie toutefois est celle d’un
voyage vers la femme qu’étrangement tantôt il tutoie
et tantôt vouvoie – de sorte que ce qu’à la lecture
on croyait une avancée, une conquête, se défait et
sans cesse recommence. Le voyage imaginaire (« et ma vie doute
encore / d’être arrivée si près de toi »)
passe par un lacis lumineux de métaphores où reviennent
volontiers l’attente sous la lampe, la marche sur les rives du Rhône,
la mer, le vent.
« Que fait ce ciel au bout des
toits
s’il ne mène à votre demeure ? »
L’amour que chante Montmaneix est
un sommet de douceur, de discrétion, tandis que parfois soudain
« l’été devient une femme nue ».